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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

ses amis, il se servira de ses équipages, et employera ses riches habits à se vêtir, lui et ses gens.

MADAME B.

Ne vous apercevez-vous pas que vous n’avez fait que reculer le mal d’un pas ? Le prodigue et ses amis consommeront, au milieu de leurs gens et de leurs clients, en splendides fêtes et en divertissements de tout genre, ce que les ouvriers ou marchands ont donné au prodigue en échange de ce qu’ils ont reçu de lui ; et le même capital sera perdu, pour lui et pour la communauté, que dans ma première supposition. La dépense du capital est une consommation stérile ; son emploi, une consommation productive.

CAROLINE.

Mais si l’on ne dépensait pas ainsi son argent, qu’est-ce que le marchand ou l’ouvrier ferait des objets de luxe qu’il a préparés dans le but de satisfaire à la demande des personnes qui dépensent pour jouir ?

MADAME B.

Ces marchands ou ouvriers auraient certainement moins d’emploi ; mais vous n’en conclurez pas que la communauté eût à en souffrir. Vous avez vu ci-devant, que le capital ne peut donner un revenu qu’en étant consommé ; s’il est consommé par des gens industrieux, qui travaillent en consommant, il y aura une production supérieure en valeur ; et ce produit, quel qu’il soit, s’échangera contre d’autres ; il se distribuera à quelque autre ordre d’industrieux, et donnera précisément le même encouragement à produire, quoique peut-être dans un genre différent. Tout ce qui est soustrait à la vaine consommation et aux profusions du riche est un fonds destiné à procurer du bien-être aux classes moyennes et inférieures.

CAROLINE.

Cependant combien de fois n’ai-je pas entendu dire, qu’une dépense noble et libérale, quoique nuisible à l’individu, est la source où les classes moyennes et inférieures puisent leur subsistance ?

MADAME B.

Il n’y a pas d’illusion plus dangereuse en fait d’économie poli-