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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

il y a plusieurs classes du peuple, qui éprouveraient une perte sensible et permanente d’une altération survenue dans la valeur échangeable de la monnaie.

Supposons, par exemple, que le propriétaire d’un pré le mette à ferme par un long bail sur le pied de 20 liv. st. de rente par an ; que quelques années après, l’argent hausse de valeur ; et qu’ayant besoin de foin pour ses chevaux, il achète pour 15 liv. st. la récolte de ce même pré. Ce propriétaire continuerait de recevoir 20 liv. st. de rente par an sur son pré, et ne paierait que 15 liv. st. pour le produit que le fermier en retire. Celui-ci perdrait donc 5 liv. st., outre les profits de son capital. N’est-ce pas là une perte bien réelle ?

CAROLINE.

Assurément ; et il en serait de même de tous les baux à ferme ; car peu importe à qui le fermier vend sa récolte ; si le prix du marché a baissé, il ne peut manquer d’être en perte.

MADAME B.

Oui. Si la monnaie doublait de valeur, la rente achèterait deux fois autant de marchandises qu’auparavant ; car 100 liv. st. achèteraient ce qui auparavant était estimé valoir 200 liv. st. ; en sorte que la rente, quoique nominalement la même, serait doublée en réalité ; et ce surplus serait pris très-injustement dans la poche du fermier pour être porté dans celle du propriétaire.

CAROLINE.

Ce mal toutefois trouvera son remède au renouvellement du bail ?

MADAME B.

Cela est vrai ; mais si l’ancien bail doit durer encore plusieurs années, le fermier peut être ruiné avant qu’il expire. Quoiqu’en tout cela la loi ne soit pas violée, il y a une infraction manifeste à la sûreté de la propriété, que nous avons dit être la base de toute richesse et le plus puissant motif à l’accumuler. Il n’y a point d’aiguillon plus pressant et qui agisse plus constamment pour exciter au travail, que la certitude d’en recueillir le fruit.

CAROLINE.

Je suppose que si la monnaie est dépréciée, parce qu’elle abonde