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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

pays même. Une plus grande demande de nos produits dans l’étranger amène une plus grande demande de capital, et élève par conséquent le taux de l’intérêt ; mais en ce cas ce n’est qu’une hausse à temps, parce que l’augmentation d’activité laborieuse dans le pays produit rapidement une augmentation de capital égale à la demande, et par-là même une baisse proportionnelle dans l’intérêt de l’argent.

CAROLINE.

Mais je croyais que l’intérêt de l’argent était fixé par la loi, et n’était sujet à aucune fluctuation ?

MADAME B.

L’intérêt légal est de 5 pour cent ; il peut tomber au-dessous de ce taux, quoique, dans ce pays, il ne puisse pas s’élever au-dessus sans devenir usure. Il y a eu un temps, où toute espèce de rétribution pour l’argent prêté était regardée à peu près du même œil que l’est aujourd’hui l’usure ; c’est-à-dire, comme faisant sur l’emprunteur un profit injuste.

CAROLINE.

Une telle opinion n’a pu être adoptée que par ceux qui n’entendaient rien à la nature reproductive du capital ; car s’ils avaient fait attention aux profits que l’on fait par l’emploi de l’argent, ils n’auraient pas regardé comme injuste de payer le prix de cet emploi.

MADAME B.

Nos ancêtres n’avaient aucune prétention à la connaissance de l’économie politique, c’est une science de nouvelle date. Le préjugé contre le prêt à intérêt ne paraît pas avoir existé dans les temps anciens ; il semble plutôt avoir pris naissance dans l’obscurité du moyen âge ; car l’intérêt de l’argent était légalement établi chez les Grecs et chez les Romains : il doit avoir été en usage au temps de Solon, puisque l’on rapporte qu’il réduisit l’intérêt de l’argent à douze pour cent. On dit que les Bramines, dans l’Inde, recevaient deux et demi pour cent par mois, il y a 8 000 ans ; et cependant l’intérêt légal n’a pas été établi en Europe avant l’année 1546.

Macpherson, dans son Histoire du commerce, fait les observations suivantes sur la défaveur attachée au prêt à intérêt. « En 1251,