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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

CAROLINE.

C’est vrai ; mais encore l’agriculture fournit aux fabriques les matériaux bruts ; c’est la terre qui donne ce dont on fait les habits et les maisons.

MADAME B.

Mais sans les manufactures, ces matériaux ne seraient pas produits. C’est la demande des fabricants qui engage le fermier à les faire naître. L’agriculture et les manufactures réagissent entr’elles pour leur commun avantage.

CAROLINE.

Cela peut être ; et malgré cela il ne me semble pas qu’elles soient également avantageuses. Les manufactures n’ont pas, comme l’agriculture, la propriété d’accroître le produit de la terre ; elles ne créent rien ; elles ne font que donner une forme nouvelle aux matériaux que l’agriculture leur fournit.

MADAME B.

Il est vrai ; mais, par cette opération, il arrive fréquemment qu’elles centuplent la valeur de ces matériaux. Et vous feriez erreur si vous pensiez que l’agriculture fait autre chose qu’arranger et combiner les parties des corps sous de nouvelles formes. À cet égard elle ne diffère des manufactures qu’en ce que le procédé de transformation s’exécute pour elle par la nature et dans le sein de la terre, d’une manière qui échappe à notre observation. Du reste l’agriculture n’est pas plus capable que les manufactures de créer une particule de matière ; ce n’est que par un changement chimique de combinaisons, qu’elle altère la forme et la nature des choses qu’on lui confie, et qu’elle ajoute à leur valeur.

CAROLINE.

Mais dans l’agriculture, la nature facilite les travaux de l’homme ; elle semble travailler avec le cultivateur ; pourvu qu’il laboure et qu’il sème, elle fait seule tout le reste. C’est la nature qui développe les germes, et qui fait sortir la plante de terre ; elle la nourrit par les pluies qu’elle répand, fait luire sur elle le soleil qui l’amène à maturité, et ne laisse au fermier presque autre chose à faire que de cueillir les fruits qu’elle a préparés pour lui.