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pays. Je serai bref, autant que le comporte le sujet. Cette contrée, si vaste dans toutes les dimensions, embrasse en entier la mer Persique, sillonnée par mille vaisseaux, et peuplée d’iles nombreuses. On dit cette mer assez étroite à son entrée pour que du promontoire d’Harmozonte, en Carmanie, on aperçoive facilement celui de Macès à l’opposite.

(11) En deçà du détroit elle s’élargit considérablement, et s’ouvre à la navigation jusqu’à la ville de Térédon, où vient se perdre l’Euphrate, successivement amoindri par la division de ses eaux. Le circuit du golfe présente un développement de vingt mille stades ; et sur les divers points de ce littoral, peuplé de villes et de bourgades sans nombre, s’opère un mouvement continuel de navires.

(12) Au sortir du même détroit, on trouve à l’orient le golfe d’Arménie, au midi celui de Cantique, et au couchant un autre peu éloigné, que l’on nomme Chalcitès. Au-delà sont les eaux de l’océan Indien, qui reçoit les premiers rayons du soleil, et sur la surface duquel règne uniformément une chaleur brûlante.

(13) Le crayon des géographes a tracé la division suivante de la Perse : Au nord elle s’étend jusqu’aux portes Caspiennes, et confine aux régions habitées par les Cadusiens, par diverses peuplades scythes, et par les Arimaspes, sauvages à l’œil louche et aux mœurs cruelles. Ses frontières au couchant sont l’Arménie, le mont Niphates, l’Albanie, la mer Rouge, et les Arabes Scénites que l’on a depuis peu appelés Sarracènes. Elle est bornée au midi par la Mésopotamie. À l’orient elle s’étend jusqu’au fleuve du Gange, qui la sépare des Indes et se jette dans l’océan Austral.

(14) Des provinces de ce royaume nous ne citerons que les principales, celles qui sont placées sous l’autorité des Vitaxes, c’est-à-dire chefs de la cavalerie, et des satrapes du roi ; car une énumération des districts secondaires serait aussi fastidieuse qu’inutile. Ce sont l’Assyrie, la Susiane, la Médie, la Perse propre, la Parthie, la grande Carmanie, l’Hyrcanie, la Margiane, la Bactriane, la Sogdiane, le pays des Saces, la Scythie en deçà du mont Émode, la Sérique, l’Arie, la Paropanisade, la Drangiane, l’Arachosie et la Gédrosie.

(15) L’Assyrie est limitrophe de l’empire. C’est la plus importante de toutes ces provinces par son étendue, sa population, la richesse et la variété de ses produits. Ses différentes fractions, désignées jadis par des noms distincts, se confondent aujourd’hui sous une dénomination unique. Le sol de cette contrée, outre qu’elle produit en abondance tous les fruits et graines des autres régions, recèle encore du bitume près d’un lac nommé Sosingitès, dans lequel le Tigre vient s’absorber, pour reparaître après un cours souterrain d’une grande étendue.

(16) On y trouve encore le naphte, espèce de résine visqueuse et analogue au bitume. Le plus petit oiseau, s’il se pose sur cette matière, s’y enfonce et périt, sans pouvoir reprendre son vol. Vient-elle à s’enflammer, on ne peut l’éteindre qu’avec de la poussière.

(17) Il existe dans cette région un puits d’où s’échappe un méphitisme mortel à tout ce qui en approche. L’infection heureusement se concentre dans le rayon du gouffre qui l’exhale, sans quoi tous les lieux circonvoisins deviendraient inhabitables.