soldats, des êtres responsables d’une partie de leur existence avant qu’ils en puissent juger par eux-mêmes ; nous en faisons des petits vieux. Ce n’est pas notre faute. — Les enfants sont vieux et les vieux sont tristes. Ils sentent que la vie fuit rapidement sur leur abrutissement routinier : l’homme contemporain se spécialise et s’encrasse. De même qu’autrefois il a fallu des hommes cordonniers, boulangers, meuniers, et qui ne fussent que cela — pour le bien des autres, il faut aujourd’hui des romanciers spéciaux, des poëtes spéciaux ; le cumul n’est plus permis.
Licence des savants du xvie siècle.
Je connais deux espèces de gens ; des hommes-microscopes et des hommes-télescopes. Les uns sont en bon état, les autres sont détraqués. C’est tout ce que je connais du monde. Les hommes-microscopes se noient dans un verre d’eau, tout leur paraît grand ; ils aiment les potins et les ragots et à en tirer des conséquences. La fortune de la France leur semble dépendre de ce que la femme du locataire du second a dit du mal de la femme du propriétaire. Ces gens-là font des philosophes myopes et des professeurs bornés. Ils écrivent souvent leurs mémoires, adorent faire leur correspondance. Il en faut pour le bien de l’humanité.
Les hommes-télescopes sont utiles aussi. Ils voient en toutes choses les grandes lignes ; ils indiquent les voies du progrès sans jamais les suivre ;