Page:Marcel Schwob - Œuvres complètes. Écrits de jeunesse.djvu/319

Cette page a été validée par deux contributeurs.
LES FEMMES disent :

Les ondulations des hanches et des cuisses,
Les soubresauts craintifs des boutons de nos seins,
Les yeux à moitié clos, les lèvres qui pâlissent,
Les gorges qui s’enflaient au milieu des délices,
Les belles aux yeux noirs savantes en tous vices,
Qui faisaient ondoyer le satin de leurs reins.

As-tu tout oublié dans tes réflexions noires,
Ô roi qui détruisis le peuple le plus fier,
Tes satins et ta pourpre et ta soie et tes moires,
Et tes lambris dorés et tes fauteuils d’ivoire,
Et tes vases sculptés qu’il faut pencher pour boire,
Ô toi qui m’aimais tant encor, le soir, hier ?

Veux-tu, viens nous coucher, tout nus, sur tes fourrures,
Serre-moi dans tes bras, je plierai comme un jonc,
Si tu veux, je mettrai mes plus belles parures, —
Ou veux-tu m’avoir nue, et sans fard, sans dorures —
L’eunuque fermera les verrous aux serrures
Et nous ne garderons ici que mon pigeon.

Il sera seul témoin de nos baisers avides,
De la pâmoison lente et des douleurs du corps —
Le soleil tombe à pic sur tes plaines arides.
Laisse donc galoper tes farouches Numides,
Viens me baiser à nu de tes lèvres humides,
M’embrasser, me serrer, et me baiser encor !

FAUST dit :

Ô femme, laisse-moi plongé dans ma misère.
Je ne veux plus de toi ; je ne veux plus d’amour.
Nous avions l’idéal — c’était une chimère —
L’existence ici-bas n’est qu’un chagrin sévère.
J’ai cru que je t’aimais comme une idole chère,
Et m’étant dégoûté, je suis las pour toujours.