Page:Marcel Schwob - Œuvres complètes. Écrits de jeunesse.djvu/303

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Ma foi, je n’aime pas garder les philosophes,
Les poëtes non plus — Ils récitent des strophes.
Je t’ai donc revomi sur la terre — et d’abord
Tu commences la vie en demandant la mort.
Écoute — tu sais tout — tu veux toucher ton songe —
C’est l’ennui qui te mord — c’est l’ennui qui te ronge,
Parce que tout n’est pas comme tu l’as rêvé —
Tu t’embêtes chez toi comme un vieux chien crevé.
Au-dessus du réel, c’est ton esprit qui plane —
Tu veux voir un pur-sang sous la peau de ton âne,
Tu veux voir un château dans ta pauvre maison
Et voyant ton erreur, tu maudis ta raison.
Et cependant tu n’es qu’un homme
En y réfléchissant ;
Tu n’es pas davantage, en somme,
Qu’un pauvre mendiant.
Mais ton orgueil t’a dit que tu créas la science,
Que tu sais distinguer, et le bien et le mal,
Que toi seul, parmi tous, possèdes la conscience,
Et que tu n’es pas fait comme un autre animal.
À ton aise !
À Dieu ne plaise
Que le diable dise non !
Car au fond de sa fournaise,
Parmi les âmes qu’il braise,
Il reconnaîtra ton nom.

LE BON ANGE dit :

Faust, écoute ma parole,
Prends garde à toi.
Le démon commence son rôle,
Le tentateur est sous ton toit.
Dieu veut te remettre à l’épreuve,
Il t’a fait sortir de l’enfer,