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Dans l’étincellement de ta beauté première,
Nous t’aimons pour l’amour que tu donnes aux dieux,
La haine qui te rend tous les hommes odieux.
Car tu leur as caché le noyau de ta force ;
Tandis que nous savons te tirer de l’écorce,
Sous ta flamme amollir les rigides métaux,
Les marteler ensuite en de puissants étaux,
Sous tes tièdes baisers réchauffer la chair crue,
D’où la graisse dégoutte, averse épaisse et drue,
Purifier dans ton sein les souillures du corps,
Où des liens matériels retiennent l’âme encor.

LES RAKSHASAS (39)

Ô Feu, nous te veillons avec notre œil unique !
Nous ne sommes jamais en proie à la panique,
Mais éternellement nous restons devant toi,
Gardiens de ton pouvoir, gardiens de notre roi.
Maudit soit le mortel (40) qui hante ces parages !
Nous avons pour aider nos éclatantes rages
Des mâchoires d’acier, des ongles acérés,
Et des ventres de fer par la faim macérés.
Dans ses boyaux brisés reniflant avec joie
Et trempant de son sang nos gueules (41) qu’il rougeoie
Nous humerions sa chair, plus douce que le miel,
Poussant notre cri rauque aux limites du ciel.
Roi, nous te protégeons d’un sacrilège inique.
Ô Feu, nous te veillons avec notre œil unique !

Les Vierges, pendant le morceau qui suit, tournent lentement autour du char de Sûr-Yâh, laissant Indrah en dehors de leur cercle. — Le chœur terminé, elles se rangent en file, d’un côté du trône d’Indrah, ne laissant auprès du Feu que les Rakshasas. De l’autre côté du trône d’Indrah, en face des Vierges, la troupe des Héros est semblablement disposée.