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LES SALONS. LA VIE DE PARIS

reprise des mêmes drames sanglants ? Quel en serait, cette fois-ci, le dénouement ? Il n’est point donné à la prévoyance humaine de le pénétrer. Mais ce que je puis vous assurer, ma chère nièce, c’est que dans toutes les conjonctures possibles, je ne cesserai d’avoir pour vous les sentiments affectueux que je vous ai voués. »

Ces deux lettres ne sont pas inédites. Mais ce qui est entièrement inédit, et même complètement inconnu (comme du reste tout ce qui a fait jusqu’ici la matière de cet article), ce sont les quelques détails par lesquels nous terminerons.

L’affection que l’empereur Nicolas avait vouée à la princesse Mathilde resta de tradition dans la famille impériale, et Nicolas II n’a cessé de la lui témoigner, mais avec la nuance de déférence et de respect que ne lui commandait pas, mais que lui conseillait son jeune âge.

On sait qu’au cours des fêtes qui marquèrent la première visite du jeune empereur à Paris, il y eut une cérémonie aux Invalides.

La princesse reçut du gouvernement une invitation à s’y rendre dans une très honorable tribune ; mais elle — si simple et faisant si bon marché des privilèges du rang, nous l’avons vu — retrouve intacte sa fierté napoléonienne dès que la prérogative même des Napoléon est en jeu.

Elle fit répondre qu’elle n’avait nul besoin d’invitation pour aller aux Invalides, attendu qu’elle avait « ses clefs » et y allait de cette manière, la seule qui convînt à la nièce de Napoléon, quand bon lui semblait. Que si l’on voulait qu’elle y allât ainsi, elle irait, et sinon, non.