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CHRONIQUES

Mais ceci, dira-t-on, n’est qu’une fête exceptionnelle. Voici l’interprétation d’une cérémonie quotidienne, la messe, qui, vous allez le voir, n’est pas moins symbolique.

« Le chant grave et triste de l’Introit ouvre la cérémonie ; il affirme l’attente des patriarches et des prophètes. Le chœur des clercs et le chœur même des saints de l’ancienne Loi, qui soupirent après la venue du Messie, qu’ils ne doivent point voir. L’évêque entre alors et il apparaît comme la vivante image de Jésus-Christ. Son arrivée symbolise l’avènement du Sauveur, attendu par les nations. Dans les grandes fêtes, on porte devant lui sept flambeaux pour rappeler que, suivant la parole du prophète, les sept dons du Saint-Esprit se reposent sur la tête du fils de Dieu. Il s’avance sous un dais triomphal dont les quatre porteurs peuvent se comparer aux quatre évangélistes. Deux acolytes marchent à sa droite et à sa gauche et figurent Moïse et Hélie, qui se montrèrent sur le Thabor aux côtés de Jésus-Christ. Ils nous enseignent que Jésus avait pour lui l’autorité de la Loi et l’autorité des prophètes.

« L’évêque s’assied sur son trône et reste silencieux. Il ne semble prendre aucune part à la première partie de la cérémonie. Son attitude contient un enseignement : il nous rappelle par son silence que les premières années de la vie de Jésus-Christ s’écoulèrent dans l’obscurité et le recueillement. Le sous-diacre, cependant, s’est dirigé vers le pupitre, et, tourné vers la droite, il lit l’épître à haute voix. Nous entrevoyons ici le premier acte du drame de la Rédemption.

« La lecture de l’épître, c’est la prédication de saint Jean-Baptiste dans le désert. Il parle avant que le