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tectrice qui valent les plus sanglantes injures. On croyait bonnement qu’elle ne s’en apercevait pas. Son principal professeur, qui, dix ans après, essaya de la séduire, ne lui ménagea aucune humiliation. L’état de gêne dans lequel le peintre vécut, tant que dura l’éducation de sa pupille, causa l’attitude du maître envers l’élève. Il lui en voulait, cet homme, de ne jamais apporter à ses cours ces hochets brillants, ces toilettes d’une irréprochable fashion, que ses autres élèves, habillées chez Mme Gabrielle et chez Worth, arboraient chaque semaine autour de la table longue couverte d’un tapis de serge verte. Mais ce savant, autour duquel les souvenirs de Sabine erraient à seize ans dans un mélange de reconnaissance et de haine, ce savant fit de l’enfant un être merveilleux. Quoique en l’accueillant froidement parce qu’elle n’habitait point un hôtel et qu’elle venait à pied, il comprit cependant que c’était placer du grec et du français à un taux profitable, que d’en meubler les cavités de cette singulière cervelle ne disant jamais : « Assez. »

De bonne heure l’enfant sut donc haïr, et, par anticipation, goûta toutes les ivresses des revendications sociales qu’elle ne pouvait encore exprimer.

Oh ! les conjurations antiques sur la tête de l’homme exécré ! Oh ! les enfantines figures de cire dans lesquelles, au moyen âge, on plantait des aiguilles, des poinçons dans le cœur de celui dont on rêvait de se repaître ! Malgré leurs puérilités, comme ces poupées exprimaient bien la revanche ! comme