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actives pour celle dont elle reconnaissait, en somme, avoir préparé la destinée.

La tête de l’enfant creusa lourdement l’oreiller, ses yeux bruns pâlirent dans son visage blanc. Renée lisait dans ses regards un immense regret, elle devinait qu’elle trouvait n’avoir pas encore assez aimé, que son calme apparent cachait une générosité, peut-être comme l’idée sublime de léguer à Renée cette vie d’amoureuse qu’elle n’achèverait pas de parcourir, elle… Et Mme de Sérigny aurait acheté d’un crime la présence de Duvicquet, pour qu’il mît une joie encore dans cette agonie. Elle voulut tâcher de compenser l’absent. Elle baisa au-dessous du sein ce buste qui se refroidissait, et vit un sourire nuancer pâlement la lèvre de la jeune femme.

— Pauvres chers, comment vivrez-vous sans moi ?… Ah ! j’aurais pu vous jouer les tours les plus impossibles… n’est-ce pas ? vous saviez bien qu’il n’y avait pour votre petite Sabine que vous, et toujours vous… Mais, maintenant… ah ! maintenant, je deviendrai la toute-belle… l’auguste… la morte… Oh ! vos regrets de ne m’avoir plus !… Comme vos yeux hallucinés vont me voir !… comme vos oreilles vont m’entendre !… Mets ma tête dans ton corsage, veux-tu ? que je te sente avec ma joue… comme cela…

— Oui, comme cela, ma mignonne adorée… comme cela ; tu es dans ta mère… sur ta vieille Renée qui va t’endormir… Ne pense donc à rien… à rien…

Mais cette lucidité étrange qui, en un pareil mo-