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sabine

souvenait qu’il lui avait promis de passer un soir.

— S’il pensait à venir maintenant ? se disait-elle très émue. Oh ! s’il pensait à venir, rien qu’une minute ?

Depuis quelques instants, elle entendait des pas discrets dans l’escalier ; ce ne pouvait être Mme Lebas, ni la concierge ; il ne restait rien à faire pour sa mère. Si c’était lui, cependant ? Ah ! il arriverait trop tard, mais ce serait toujours cinq minutes qu’elle causerait avec une grande personne, sans être molestée par les voisins.

Elle ne se trompait point, pourtant ; les pas se rapprochaient… on entrait dans l’allée de sa chambre… on se dirigeait de son côté.

La porte fut poussée, et la personne qu’elle attendait apparut soudain. Un cri étouffé sortit de la bouche de Frissonnette, qui se leva tremblante.

Le nouvel arrivé eut un geste étrange en rencontrant la petite fille seule ; il regarda la bière, poussa la porte et la ferma à clef. Frissonnette, étonnée, l’examinait. Alors il prit la chaise de paille, s’assit et attira l’enfant entre ses genoux. Ne comprenant rien à ce qu’il voulait d’elle, Frissonnette écoutait cette voix murmurant de douces paroles. Un homme si richement mis, décoré, qui lui parlait si affectueusement, ne représentait pour elle qu’un bienfaiteur attiré par sa misère, qui pensait autrement que les autres. À l’atelier, on l’entretenait souvent de gens très riches, qui, pour accomplir le bien, s’introduisaient chez les malheureux, juste au moment où