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tronne, une sainte, un bienheureux, tout ce que vous voudrez à présenter au culte de vos ouailles, mais ne me parlez pas d’ôter la châsse de Saint-Clair.

— Eh bien, savez-vous une chose, Monsieur le curé ? reprit Mme Raimbaut, après avoir rêvé quelques minutes, je ne serais pas éloignée de croire que j’aurais votre affaire, moi ; et les gens de Saint-Clair enrageraient furieusement.

Le curé, abasourdi, regarda celle qui lui parlait ainsi ; il vit une si franche expression dans sa physionomie, tant de limpidité dans son regard, qu’il ne douta pas de sa bonne foi.

— Vous vous taisez ? poursuivit Sabine gaiement. Je conviens que ma jeunesse et mes allures ne s’harmonisent pas précisément avec la proposition édifiante dont je me constitue l’interprète. Mais au bout du compte, Monsieur l’abbé, vous resterez libre de la refuser, vous ou Monseigneur, car je compte certainement soumettre la chose à notre digne évêque, à l’un de mes prochains voyages à Bourges.

Ces dernières paroles furent le « Sésame, ouvre-toi » de l’intelligence du curé. L’idée que Monseigneur pourrait lui souffler au profit d’une autre paroisse les reliques d’un saint inédit, cette idée l’enflamma d’une rougeur d’athlète.

— Voyons, voyons, s’écria-t-il, plein d’enjouement, je vous écoute, ma chère dame.

— Imaginez-vous, Monsieur le curé, qu’une de mes tantes, vieille fille de soixante-dix-neuf ans, est morte en odeur de sainteté, me léguant pour