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C’est lui qui, modulant ces accords inconnus,
Plaintes des flots, échos des bois, concerts des anges,
Faisait naître les fleurs parmi les rochers nus
Et les candeurs parmi les fanges.

Il chanta la nature immortelle ; l’amour
Embaumé, radieux et pur à son aurore,
Comme sur les coteaux, quand apparaît le jour,
Les beaux fruits que le soleil dore.

Mais au souffle vainqueur des grandes passions,
Quand sa lyre exhalait ses notes douloureuses,
Sur le lac azuré des Méditations,
Ou sur les collines ombreuses,

Alors, tout se taisait pour écouter sa voix ;
Les ondes, les forêts apaisaient leurs murmures,
La brise interrompait sa plainte au fond des bois,
L’oiseau son chant dans les ramures.

Ou bien, se souvenant des coteaux de Milly,
Gravement, comme on fait pour une confidence,
Il parlait de sa mère, au front déjà pâli,
Et des rêves de son enfance.

Comme le matelot qui remonte le cours
D’un fleuve reflétant ses rives dans son onde,
Son hymne s’élevait et remontait toujours
Vers Celui qui créa le monde.

Il sonda l’Éternel et son immensité.
Le nom de Jéhovah remplit ses harmonies,
Et, dans son vers nombreux, vibra répercuté
Le chant des sphères infinies.

Puis, descendant du ciel vers les terrestres bords,
Calmant les désespoirs et dissipant les craintes,
Il connut, Liberté ! mère des peuples forts,
Tes chastes et mâles étreintes.