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granvelle aux pays-bas

l’Inquisition Espagnole, redoutée par eux surtout à cause de ses procédés odieux qui répugnaient aux mœurs locales ; les placards de Charles-Quint, plus sévères au fond, sinon dans la forme, lui suffisaient ; mais il prétendait les faire rigoureusement exécuter et transformer ainsi en persécution active, ce qui n’avait guère été jusque-là, qu’une menace contre l’hérésie. Enivré par le double fanatisme du pouvoir absolu et de la foi religieuse, il croyait avoir reçu de Dieu, avec la couronne, la mission sacrée de maintenir par tous les moyens, même par l’échafaud et les autodafés, ses sujets dans l’obéissance politique et dans la vraie foi. Il prescrivait des supplices qui amenaient des révoltes populaires ; il jugeait alors la répression insuffisante, gourmandait ses agents « qui y allaient trop flochement », et pressait sa sœur de trouver et de punir un plus grand nombre de coupables. Les Huguenots sur le bûcher haranguaient le peuple ; il ordonna de les bâillonner. Bâillonnés, ils conservaient l’attitude enthousiaste et triomphante de martyrs qui meurent pour leur foi et qui croient voir le ciel e’ouvrir ; il enjoignit de les faire mourir dans l’enceinte de la prison, étranglés ou noyés dans un baquet !

Entre ce forcené et les malheureuses provinces dont le hasard des héritages avait mis le sort entre ses mains, quel fut le rôle de Granvelle ? Granvelle