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le charme de l’histoire

poursuivis par ceux de leurs anciens complices qui venaient de les renverser du pouvoir. Des enquêtes furent ouvertes, des procès furent commencés contre ceux que l’on appelait les buveurs de sang. Les victimes étaient sollicitées de porter plainte contre leurs persécuteurs, et répugnaient à ces délations. Mais bientôt la Révolution, entraînée par la force des événements, ne tarda pas à reprendre son cours. Après Vendémiaire et Fructidor, les persécutions recommencèrent. On vit reparaître dans le département, avec le titre de commissaire du pouvoir exécutif, Hézine, l’un des quatre enrages contre lesquels la population s’était prononcée avec tant de colère lorsqu’elle avait cru être délivrée à jamais de leur tyrannie. Les députés fructidorisés, puis les interminables convois de prêtres dirigés sur les îles de Ré et d’Oléron pour être déportés, font étape aux Carmélites de Blois, où la pitié des habitants leur offre des matelas. Bientôt les ci-devant nobles sont de nouveau l’objet de mesures d’exception ; une loi les assimile aux étrangers, leur refusant ainsi les droits de citoyens (loi du 9 frimaire an VI) ; on prétend leur interdire de porter la cocarde nationale (II. 406). Une autre loi les déclare responsables des troubles et prescrit de prendre parmi eux des otages (loi du 24 messidor an VII), et Dufort indigné s’écrie : " Si les émigrés ressentent toutes les angoisses du malheur et de