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dufort de cheverny

un temps de révolution vit plus de cent ans en cinq. Les peines d’esprit amènent une agitation continuelle, qui finit par donner une stupeur, un ennui de la vie qui ne peuvent s’exprimer. »

Nous venons de faire connaissance avec le costume de l’ex-capucin Chabot ; voici maintenant celui de Grégoire, son évêque : « un chapeau rond et très haut, une cocarde nationale, une énorme cravate, une redingote noisette, une veste rouge, une culotte noire et des bottines » (II. 145).

À mesure que les évènements se pressent, il devient, sinon plus facile, du moins plus nécessaire de se faire oublier. Dufort finit par s’enfermer à Cheverny. « Nous nous bornions à notre enceinte, sans, pendant plus de six mois, avoir voulu sortir même une fois dans le village ; nous ne pouvions n savoir des nouvelles de ce qui se passait pour les arrestations que par des tiers, n’écrivant et ne recevant aucune lettre » (II. 177). Toutes les lettres en effet étaient décachetées et devenaient un danger pour celui qui les écrivait et pour celui à qui elles étaient adressées (II. 145 et 148) ; un vieux domestique, resté fidèle comme tant d’autres qui à cette époque furent les protecteurs de leurs maîtres[1],

  1. Voir le rôle que jouèrent les domestiques de M. de Salaberry et du marquis de Romé, prenant courageusement la défense de leurs maîtres dans les clubs, où seuls ils étaient écoutés, les suivant dans les prisons, etc. (II. 178, 187-189-195, etc.)