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leurs députés, qui décèle le dessein de l’administration de prévenir tout ce qui pourrait s’opposer à ses vues ; de cette tenue des États sous les yeux de la Cour, qui menace la liberté des délibérations de vos Représentants. Je laisse de côté tous ces objets inattendus, bien propres à inspirer de la défiance, et je ne vous parlerai que des desseins avoués du Roi. Il veut s’aider des conseils de la Nation, afin que les abus de tout genre soient réformés et prévenus par de bons et solides moyens qui assurent à jamais la félicité publique. Voilà de magnifiques projets ; mais, hélas ! ces projets magnifiques, à quoi se réduisent-ils ? D’après les événements qui ont nécessité la convocation des États, on ne peut guère espérer qu’un nouveau plan de finances[1]. Or, la réforme générale qu’on nous promet ayant été sollicitée par le Ministre qui les dirige, il est peu probable

    tous les écrits publics sur les affaires nationales, on pourrait croire qu’un article du Ve Discours de l’Offrande à la Patrie a donné lieu à cette disposition du Règlement. Je suis bien éloigné de chercher à élever des obstacles aux opérations de ce sage Ministre, dont je respecterai toujours les bonnes intentions ; mais je plaide pour la Patrie, et elle seule a tous mes vœux. Or, s’il serait insensé d’arrêter inconsidérément la marche des opérations, il ne le serait pas moins de ne prendre aucune mesure pour qu’elles aillent au bien général : car, quel que soit le désir du gouvernement de rendre les sujets heureux, ce désir perdrait sans doute beaucoup de sa vivacité, si l’on commençait par consentir les impôts, et les États seraient immanquablement dissous avant d’avoir rien fait pour assurer la félicité publique.

    Il importe donc à la nation d’imposer à ses représentants le devoir de ne délibérer, ni sur le déficit, ni sur la dette royale, ni sur les impôts, que les lois fondamentales du Royaume ne soient consacrées. Pour tout le reste, carte blanche : car s’ils ont besoin de sagesse et de vertu, c’est pour élever l’édifice d’une constitution juste et libre. (Note de Marat)

  1. Ce nouveau plan ayant pour but de répartir les impositions entre les citoyens proportionnellement à leurs facultés, sera extrêmement avantageux sans doute ; mais sera-t-il général, s’étendra-t-il aux pays d’État, dont le Règlement ne dit pas un mot ? (Note de Marat)