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De ces associations d’hommes vains et bornés, que doit-il donc résulter dans un pays où la presse n’est pas libre, où l’intrigue tient lieu de talents, et où le gouvernement, peu accoutumé à rechercher le mérite, n’est pas même en état de le distinguer ? La décadence des lettres et le bouleversement des sciences. Je ne crains pas de le dire, si les choses continuent sur le même pied, nos arrière-neveux ne pourront pas s’enorgueillir d’un seul auteur qui sache lire.

Lettre VI

Pourquoi, diras-tu sans doute, ravaler si fort les compagnies savantes ? Un avantage du moins qu’on ne peut leur contester, c’est l’encouragement qu’elles offrent au mérite.

Je sais qu’on fait sonner bien haut ces prix qu’elles distribuent chaque année, avec tant d’appareil : loin d’applaudir à cet usage, je ne connais rien de plus décourageant, de plus ridicule, de plus mal imaginé.

Ces prix sont offerts au mérite, j’en conviens ; mais ils ne sont guère accordés qu’à l’intrigue : il faudrait arriver de l’autre monde pour prétendre que les académies sont les seules associations où l’on ne connaisse pas le commérage ; quant à moi, je sais un peu à quoi m’en tenir.

Crainte qu’on ne les accusât de partialité, elles sont convenues que leurs propres membres ne pourront point concourir pour les prix qu’elles viendront à proposer ; mais le diable n’y a rien perdu : car ceux d’entre eux qui ne sont pas voués à l’oisiveté, font proposer dans l’étranger la

    tenir que par la recherche des nouveautés qui réunissent la solidité à l’agrément, on continue à rabâcher la doctrine de la différente réfrangibilité, de la différente réflexibilité, et toutes les opinions erronées qui en découlent ; c’est ce dont je ne puis revenir d’étonnement. (Note de Marat)