quelques feuilles énergiques firent courir aux armes, soixante mille citoyens de tout état marchèrent à Versailles, malgré les efforts des municipaux, du général et de l’état-major. Tout fléchit devant le saint amour de la liberté : les complots désastreux des ministres perfides avortèrent, quelques satellites royaux expièrent leurs forfaits dans leur sang ; on s’empara de toutes les avenues. Cependant les assassins ministériels, cachés dans les jardins, viennent à la faveur des ténèbres se présenter aux portes du château, ils découvrent les dangers qui les menacer, et ils prennent la fuite.
Revenu de ses transes, le ministère ne songea plus qu’à tirer parti de sa défaite, en tournant contre la patrie les armes de ses propres défenseurs ; il jeta avec art le voile du ridicule sur les machinations des conjurés, et oublia la conspiration trop réelle formée contre la nation, par l’annonce d’un complot imaginaire formé contre la famille royale : il travailla à faire passer pour traîtres à la patrie ses propres défenseurs, auxquels il prêta ses projets d’assassinat. Il répandit l’or à pleines mains, fit accuser par des espions soudoyés les d’Aiguillon, les Duport, les Lameth, de s’être déguisés en femmes pour assaillir l’appartement du roi, il engagea les comités national et municipal des recherches à faire des enquêtes contre les braves Parisiens qui avaient puni les satellites royaux le 5 octobre ; il acheta[1] le Châtelet, et le chargea d’instruire leur procès, dans lequel il compromit quelques-uns de nos fidèles représentants, en faisant déposer contre eux les noirs et les ministériels, à la fois traîtres et parjures. C’est avec ce ridicule fantôme, que les ennemis de la révolution réus-
- ↑ J’ai en mains une dénonciation, dûment signée et contrôlée en janvier dernier, contre le ministre des finances, où il est accusé d’avoir fait donner une pension de douze mille livres à Bachois, une pareille pension à Brunville, et une de trois mille livres à un conseiller du Châtelet. Il y a cent à parier contre un que cette dénonciation est bien fondée. (Note de Marat)