me fais justice. N’osant aspirer au bonheur d’être l’interprète avoué des sentimens de la patrie et des hommages qu’elle rend aujourd’huy, par votre ministère, à la mémoire de l’illustre citoïen qui l’honora le plus ; je vais me perdre dans la foule, pour entrer dans le temple dont vous venés d’ouvrir les portes ; et tandis que l’encens fumera à l’honneur de ce génie bienfaisant, recueilli dans un respectueux silence, je traceroi quelques[1] lignes au pied de ses autels.
Charles de Secondat, baron de Montesquieu, ancien président à mortier au Parlement de Guyenne, de l’Académie des sciences et belles-lettres de Bordeaux, de l’Académie françoise, de l’Académie des sciences et belles-lettres de Berlin, de la société royale de Londres, etc., naquit au château de La Brède[2], le 18 janvier 1689. Je ne diray rien ici de la noblesse de sa famille, quelqu’eût été l’illustration de ses ayeux, ce mérite étranger n’ajouteroit rien à l’éloge d’un sage qui fut tout par lui-même.
Les présages de l’enfance, ordinairement si trompeurs, ne le furent point dans Charles de Secondât ; il fit connoître de bonne heure ce qu’il seroit un jour.
Sa jeunesse fut consacrée à la jurisprudence, science obscure et aride, où il sut porter le flambeau de la raison et les vues de la philosophie : mais elle ne suffit pas longtemps à l’activité de son esprit. Bientôt il joignit à l’étude des lois civiles et criminelles, l’étude du droit naturel et du droit public.
Dans le choix de ses premières études, son goût n’avoit pas été consulté ; heureusement elles se trouvèrent analogues à ses talens, et docile à l’impulsion qu’il avoit reçue, il continua longtemps à la suivre. Avant de s’élancer dans