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sidérer Robert Labrousse ainsi qu’un étranger ; et, sans mesquinerie, laisser subsister les relations des deux amis. Sa fierté de femme l’y obligeait.

Elle lui répondit donc avec le plus d’aménité possible, refoulant l’immense tristesse, l’inexplicable apeurement qui bouleversaient son être au contact de cet homme redouté, aimé, détesté ? elle ne savait plus…

Dans le désarroi où se noyaient toutes ses sensations, un seul sentiment surnageait : le désir éperdu de sauver son orgueil, d’éviter l’affront d’une seconde humiliation en face de cet homme.

La jeune femme se contraignait héroïquement à sourire d’un air paisible, alors qu’intérieurement elle se sentait ravagée par une haine ou un amour insensé, souhaitant tour à tour l’anéantissement de Labrousse et résistant à l’envie de se jeter follement contre sa poitrine.

Dans son exaspération passionnée, elle se rappelait la vraie légende de Salomé et en pénétrait la psychologie profonde. Ah ! quelle est l’amoureuse dédaignée qui — si ce fût en son pouvoir — ne ferait point trancher la tête de Jean pour se