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mon et Nelly Rosane se penchaient, attentifs. Marcel commença :

— Fine, gentille, fraîche et toute jeune — une vingtaine d’années — je l’avais prise à mon service sans la remarquer beaucoup, mais je la remarquai fatalement du jour où elle fut à mon service… Vous savez quel charme se dégage d’une petite figure studieuse penchée sur votre travail. Malgré soi, tout en dictant, on détaille la ligne délicate d’une nuque frêle, les traits fuyant en profil perdu… On s’approche plus qu’il n’est nécessaire pour vérifier sa copie, tout en respirant le parfum d’une chevelure soyeuse… Bref, un jour, je risquai la proposition galante. Et j’eus la stupeur d’entendre la petite me répondre : « C’est inutile… Je serais incapable de vous aimer parce que vous êtes trop heureux, trop riche, trop au-dessus de moi. Je sens que, si jamais je m’éprends de quelqu’un, ce sera d’un homme qui aura besoin d’appui ou de consolation ; un garçon dédaigné, pauvre et malchanceux, que j’aiderai à lutter contre son sort. Moi, j’ai besoin de plaindre un peu ceux que j’aime. » Et cette déclaration faite, ma jeune se-