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— Eh bien, non !… Je n’ai pas honte. Je défends mon amour, moi aussi ! Entends-tu, j’accepte toutes les compromissions, toutes les lâchetés, toutes les fautes, pour rester innocente aux yeux d’Abel !… Je l’aime, à présent, tu le sais… Je ne pourrais pas supporter l’idée qu’on lui révélât le subterfuge grâce auquel je l’ai séduit. Tu le connais : si ombrageux, si méfiant, il en serait désenchanté du coup ; il me mépriserait, sans vouloir ajouter foi à mes protestations, maintenant que je ne lui mens plus… Ce serait trop intolérable… J’en mourrais. Gilberte, je ne te parle plus de toi, ni de ton intérêt… C’est à ta pitié, à ta générosité, que je fais appel : sauve-moi de cette torture !… Quelle injustice… En somme, c’est nous deux seulement que frappe le dénouement d’une aventure dont Suzanne, indemne elle, est uniquement responsable : ironie du hasard ! C’est elle qui nous a précipitées dans l’abîme ; c’est sa faute si d’Arlaud t’a connue, si je suis entraînée, à ta suite, à subir les conséquences de son inconséquence. Et tandis que nous nous débattons au fond du trou, blessées, meurtries, déchirées vives, Su-