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On l’engage à continuer. Marthe s’empresse, la complimente. Claude recherche dans sa mémoire.

Installée vis-à-vis du piano, toute menue devant ce monument de palissandre, Claude offre un joli profil studieux à la paupière abaissée, à la bouche pensive. Un rayon de soleil, se glissant par la baie entr’ouverte, traverse le salon, vient se nicher au creux de la nuque de la jeune fille, et s’amuse à faire miroiter dans sa lumière blonde l’or rutilant du chignon roux.

Les nerfs de Claude vibrent de plaisir à retrouver la jouissance perdue ; ses petites pattes exercées écartent démesurément leurs phalanges étroites pour plaquer les accords sonores ; puis, elles se relèvent soudain avec un geste d’envolée. Claude exécute la première partie de l’admirable Schéhérazade de Rimsky-Korsakow, avec une compréhension parfaite qui exprime l’âme de l’œuvre ; et une habile virtuosité d’amateur qui escamote adroitement les trop grandes difficultés en croquant quelques notes, de-ci de-là. Claude a les yeux mi-