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gance sans afféterie et son goût parfait ; — le bonheur si naturel qu’elle mérite, lui est refusé parce que M. Derive laisse des millions à ses fils. C’est la fille de quelque gros commerçant enrichi à vendre des épices, du papier ou du drap, qui aura le droit de s’appuyer au bras de Georges Derive ; mais, la fine et jolie fille d’un musicien obscur doit s’unir avec reconnaissance à l’employé commun et trivial, qui assume les obligations d’une gêne partagée. Claude gémit contre les hasards de notre naissance : son père aurait pu être l’un de ces rois du négoce qui déposent une fortune sur le berceau de leur nouveau-né. Mais une étrange bouffée d’orgueil la roidit : « Eh bien ! non : j’aime mieux avoir du sang d’artiste dans les veines : c’est un plus bel héritage. » Néanmoins, Claude éprouve une détresse intense à penser qu’il lui faut repousser de toutes ses forces cet amour incomparable dont elle se fût montrée si fière ! Si Georges était dans la situation de Jacquard, seulement… Car, désintéressée comme on l’est à vingt ans — c’est avec les besoins de l’âge