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des lépreux, sans une souillure pour sa chair de neige. Bourgeoise vertueuse, elle a passé sa première jeunesse, sans doute, à rater piteusement des mariages que sa situation fausse et la position douteuse de son père rendaient irréalisables. Tout en souhaitant passionnément un époux, elle n’a pas su retenir un homme d’honneur. Mais elle dissimule son humiliation. Elle n’avoue pas son idéal prosaïque d’existence conjugale. Elle préfère usurper la réputation d’une femme galante. Elle fait croire à ses aventures. Elle devient le fanfaron du vice. En agissant différemment, elle craindrait de perdre son prestige, et elle a raison… Car, sans la science de l’amour, quel charme de plus possède, à trente ans, une fille vierge comparée à la jeune vierge de vingt ans ?… Comment peut-elle espérer encore qu’un homme la délivrera du célibat ? Devant l’ignorance égale de ces deux candidates quel homme hésiterait à choisir celle qui rachète, au moins, la maladresse de son inexpérience par l’attrait de son adolescence en fleur ?


François Bergeron fit une pause destinée à ponctuer son raisonnement.