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si peu conforme au modèle Mermillod, si tentante, si troublante, qui se confessait ingénument : « Devant l’amour, tel qu’il se présente à moi, je regrette autant d’avoir conservé ma virginité que certaines filles peuvent déplorer d’avoir perdu la leur… D’autre part, puis-je continuer à jouer jusqu’au bout cette comédie voluptueuse dont j’ignore les dernières répliques ?… Je vous en prie, Monsieur, conseillez-moi : dois-je me taire ou dois-je lui dire que je suis… ou plutôt que je ne suis pas… ? »

Souvent, bien souvent, depuis cet entretien mémorable, la captivante apparition de Mademoiselle Thulette était venue divertir l’imagination du philosophe au milieu de ses concepts transcendantaux, imposant une orientation fantaisiste à son génie désarmé.

On a beau avoir consacré sa vie à quelque but sublime : à l’ambition, à la gloire, à la réduction des classiques antinomies, écueil de la pensée prékantienne, on a beau appartenir à l’Institut, fréquenter les sociétés savantes et la société mondaine encore plus ennuyeuse qu’elles, bref, sexagénaire à cheveux blancs, se croire fini, racorni par les ans, le labeur et les honneurs, à jamais libéré du Désir, ce qui