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réunit dans un souper, parmi les fleurs et la musique. Il me semble vivre un conte de mon pays…

Thérèse, trop romanesque pour ne pas se prêter à ce caprice, rit de bonne grâce ; mais, sans pouvoir chasser sa préoccupation dominante, elle questionna de nouveau :

— Dites-moi, méchant, à présent que vous ne l’aimez plus, vous pouvez bien m’avouer pourquoi vous m’avez préféré cette demoiselle Thulette. La trouvez-vous donc tellement mieux que moi ?

Fanny lui jeta une œillade diabolique ; si son instinct de femme lui avait suggéré l’attitude — voire les attitudes — à prendre auprès de cette innocente Thérèse, c’est qu’elle se souvenait pour l’avoir éprouvé elle-même, cette liseuse du Kama-Soutra, que la révélation trop brusque de la sensualité emplit la pudeur d’un affreux dégoût. Rien de commun entre l’amour tel que l’imagine une jeune fille chaste, d’éducation surveillée strictement, et celui qui se pratique après un souper échauffant, en cabinet particulier. Entièrement confiante dans la réserve dont il ne se départait jamais, Thérèse se figurait que le correct Edvard ne la pouvait