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nait. Une foule fantasquement bariolée s’agitait, se bousculait, miroitait, grisée de lumière et de parfums, surexcitée par les bouffées d’harmonie capiteuses qui s’essoraient d’un orchestre enfoui dans la verdure. Fanny se glissa entre des masques qui la suivaient déjà, intrigués par l’éclat de son domino rouge. Malgré sa belle audace, son cœur battait de crainte que son subterfuge ne fût découvert. Mais le comte Kolding devait à sa race aristocratique et à son origine scandinave une svelte souplesse, une pâleur de teint, une finesse d’attaches et comme une « blondeur » qui le paraient d’un charme, par instants, androgyne. C’est pourquoi la beauté dominatrice de Mademoiselle Thulette imitait ce jeune homme d’une grâce presque féminine, à s’y tromper.

Parmi la foule bruissante, Fanny remarqua presque aussitôt deux femmes qui semblaient aux aguets. Devinant Thérèse et sa mère, elle se fraya non sans peine un passage jusqu’à elles ; soudain, elle sentit une petite main se poser timidement sur son bras et une émotion indéfinissable la troubla quand Mlle de Tresme, un peu émue de ce rôle tout nouveau