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tre emmailloté, elle disait doucement comme un bébé qui souffre :

— J’ai bobo.

O ! transformation émouvante de, l’être qui apprend à renaître pour la seconde fois, à refaire le chemin de sa vie en le reprenant de la première étape : lit de malade, berceau de l’adulte où l’âme se ranime dans un réveil ingénu !

Le docteur Warton rendait visite à sa cliente : il paraissait satisfait de son état,

— Pas de fièvre ?…

Tandis que le thermomètre introduit en elle, on prenait sa température, ils échangeaient un long regard par-dessus la malade. Ils étaient assis de chaque côté de la ruelle : ce lit d’opérée les unissait et les séparait à la fois : image de leur destin.

Warton songeait à Bessie Arnott. Laurence pensait que Jack était fiancé à la sœur de Teddy, ce gentil bienfaiteur.

Foncièrement honnêtes, ils concluaient en même temps que leur baiser d’hier n’aurait point de lendemain. Mlle d’Hersac en éprouvait une cuisante humiliation : le chirurgien, si sérieux de caractère, n’avait donc pas d’estime pour elle qu’il avait commis la légèreté de ce geste irréfléchi, comme on cueille une fleurette au passage pour la rejeter insoucieusement la minute d’après ?

Et pourtant, tout démentait un tel sentiment