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relevant de maladie qui se promènent avec précaution pour ne pas déranger ce qui se remet, avant que cela ait pris de la consistance. 3. Il a supprimé en lui tout désir, et il a transporté toutes ses aversions sur ce qui est contraire à la nature dans ce qui dépend de nous. En toutes choses ses tendances sont modérées. S’il paraît bête ou ignorant, il ne s’en inquiète pas. En un mot il se défie de lui-même comme d’un ennemi dont on craint les piéges.

XLIX

Quand un homme est tout fier de pouvoir comprendre et expliquer les livres de Chrysippe1, dis en toi-même : « Si Chrysippe avait écrit clairement2, cet homme n’aurait pas de quoi se vanter. Pour moi, qu’est-ce que je veux ? connaître la nature et la suivre. Je cherche donc quel en est l’interprète ; j’apprends que c’est Chrysippe et je vais à lui. Mais je ne comprends pas ce qu’il a écrit ; alors je cherche quelqu’un qui me l’explique. Jusque-là il n’y a rien de bien extraordinaire. Mais quand j’ai trouvé l’interprète, reste à mettre en pratique les préceptes, et c’est cela seulement qui est beau. Mais si c’est précisément l’explication des préceptes que j’admire, n’est-il pas arrivé que je suis devenu grammairien3 au lieu de philosophe ? Seulement : au lieu d’Homère4 j’explique Chrysippe. Aussi quand on me dit : « Explique-moi « Chrysippe », si je rougis, c’est plutôt5 de ne pas pouvoir montrer une conduite qui soit semblable et conforme à ses préceptes. »