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venu, pour qu’il la trouble et la bouleverse par ses injures, tu n’en as pas de honte ?

XXIX

1. Dans toute affaire, examine bien les antécédents1 et les conséquents, et alors entreprends. Sinon, tu seras d’abord plein de feu, parce que tu n’as pas réfléchi à l’enchaînement des choses ; et plus tard, quand quelques difficultés se produiront, tu renonceras honteusement. 2. Tu veux être vainqueur aux jeux olympiques2 ? Et moi aussi, de par les dieux ; car c’est une belle chose3. Mais examine bien les antécédents et les conséquents, et alors entreprends. Il faut obéir à une discipline, manger de force4, t’abstenir de gâteau, faire des exercices forcés, à des heures réglées, par le chaud, par le froid, ne boire ni eau fraîche ni vin indifféremment, en un mot, te mettre entre les mains du dresseur comme entre celles d’un médecin ; puis, dans l’arène, il faut creuser des fosses5, quelquefois se démettre un bras, se donner une entorse, avaler force poussière, quelquefois être fouetté6, et avec tout cela être vaincu. 3. Quand tu auras bien pesé tout cela, si tu persistes, fais-toi athlète. Sinon, tu seras comme les petits enfants qui jouent tantôt au lutteur, tantôt au gladiateur, qui tantôt sonnent de la trompette, tantôt déclament ; de même, tu seras tantôt athlète, tantôt gladiateur, puis rhéteur, ensuite philosophe, et jamais rien du fond de l’âme ; tu imiteras comme un singe tout ce que tu verras faire, et chaque chose te plaira à son tour. C’est qu’avant d’entrepren-