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Une première remarque essentielle à faire, c’est que ce petit livret ne s’adressait pas aux gens cultivés en général qui ne s’occupaient pas spécialement de philosophie, mais uniquement à ceux qui voulaient faire profession de philosophie et qui avaient déjà été instruits dans la logique, la physique et la morale stoïcienne ; c’est un memento à l’usage de ceux qui sont en progrès (προκοπή). Quoiqu’en principe les stoïciens n’admissent pas d’intermédiaire entre la sagesse et la folie, entre la vertu et le vice[1], ils reconnaissaient pourtant qu’il y avait des degrés dans la folie et le vice, que les uns sans posséder la sagesse en étaient tout près, qu’il ne leur manquait que d’avoir été mis à l’épreuve ; que les autres n’étaient pas assez sûrs d’eux-mêmes et pouvaient retomber dans les vices dont ils avaient été guéris ; qu’une troisième classe enfin comprenait tous ceux qui n’étaient qu’incomplétement guéris[2]. C’est évidemment à ces deux dernières classes que s’adressait le Manuel.

Les stoïciens divisaient la philosophie en trois parties (τόποι) coordonnées, logique, physique (ou

    vaisson a publié en 1836 un remarquable Essai sur le stoïcisme dans la collection des Mémoires de l’Académie des inscriptions (XXI, 1). Nous y renvoyons le lecteur.

  1. Diogène Laërce, VII, 127.
  2. Sénèque, Lettr., lxxv, 8.