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EXTRAITS DES ENTRETIENS D’ÉPICTÈTE.

XXI

Contre ceux qui veulent se faire admirer.

Pourquoi marches-tu aussi raide que si tu avais avalé une broche ? — Je veux que tous ceux qui se trouvent sur mon chemin m’admirent et me suivent en criant : Quel grand philosophe ! — Et qui sont ces gens dont tu veux te faire admirer ? Ne sont-ce pas ceux dont tu as l’habitude de dire qu’ils sont fous ? Et c’est par des fous que tu veux être admiré !

XXII

Comment doit-on lutter contre les circonstances difficiles ? Le témoignage de Diogène. — Riches et pauvres.

Ce sont les circonstances difficiles qui montrent les hommes. À l’avenir, quand il s’en présentera une, dis-toi que Dieu, comme un maître de gymnase, t’a mis aux prises avec un adversaire redoutable. « Pourquoi ? » me dis-tu. Pour faire de toi un vainqueur aux jeux olympiques ; et tu ne peux l’être sans sueurs.

Voici qu’aujourd’hui nous t’envoyons dans Rome à la découverte ; or, on n’envoie jamais un lâche à la découverte, car s’il entendait le moindre bruit ou apercevait l’ombre de quoi que ce fût, il reviendrait en courant, hors de lui, et disant que les ennemis sont là. Si, à son exemple, aujourd’hui tu revenais nous dire : « Quelles épouvantables choses il y a à Rome ! La mort est bien terrible ! Terrible est l’exil ! Terrible l’ignominie ! Terrible la pauvreté ! Fuyez, ami ; l’ennemi est là ! » nous te dirions : Va-t’en ! garde tes avertissements pour toi ! notre seul tort à nous, ç’a été d’envoyer un pareil individu à la découverte.

Diogène y a été envoyé avant toi ; mais ce qu’il nous a rapporté est bien différent : il dit que la mort n’est pas un mal, parce qu’elle n’est pas une honte ; il dit que la gloire est un vain bruit, que font des insensés. Quelles belles