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MANUEL D’ÉPICTÈTE.

tu garderas la mesure ; si tu les passes, tu seras entraîné désormais comme dans un précipice. De même pour les souliers, s’ils excèdent les besoins de ton pied : tu les voudras d’abord dorés, puis de pourpre, puis brodés ; car, une fois la mesure passée, il n’est plus aucune borne.


XL

de l’éducation des femmes.


Les femmes ont à peine atteint leur quatorzième année que les hommes les appellent leurs maîtresses : elles jugent de là que nulle autre qualité n’est en elles, si ce n’est de pouvoir servir aux plaisirs des hommes ; elles commencent donc à se parer, et dans leur parure mettent tout leur espoir. Mais c’est chose digne à tenter, que de leur faire sentir que rien ne peut les rendre respectables, si ce n’est la modestie et la pudeur[1].

  1. Le stoïcisme, en montrant que nul être raisonnable et libre n’a sa fin et son prix hors de soi-même, mais en soi, préparait l’affranchissement de tous les êtres qui semblaient faits non pour eux-mêmes, mais pour l’utilité ou pour le plaisir d’autrui : c’étaient les esclaves d’abord, puis les femmes, dont souvent la condition ne fut guère supérieure à celle des esclaves.

    Épictète, sur ce point, ne fait que continuer Socrate. Il faut lire, dans les Économiques de Xénophon, l’entretien rapporté par Socrate entre deux jeunes mariés : les rapports de l’homme et de la femme y sont compris d’une manière toute moderne. — « Quand elle se fut familiarisée avec moi, et que l’intimité l’eut enhardie à converser librement, je lui fis à peu près les questions suivantes : — « Dis moi, femme, commences-tu à comprendre pourquoi je t’ai choisie, et pourquoi tes parents t’ont donnée à moi ?… Si la Divinité nous donne des enfants, nous aviserons ensemble à les élever de notre mieux ; car c’est un bonheur qui nous sera commun, de trouver en eux des défenseurs et des appuis pour notre vieillesse. Mais dès aujourd’hui, cette maison nous est commune. Moi, tout ce que j’ai, je le mets en commun, et toi, tu as déjà mis en commun tout ce que tu as apporté. Il ne