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de nos têtes : ou bien de quatre-vingts à cent millions de Français, fortement établis sur les deux rives de la Méditerranée, au cœur de l’ancien continent, maintiendront à travers les temps, le nom, la langue et la légitime considération de la France. Qu’on en soit pourtant bien persuadé : ce n’est pas à un moindre prix, ni avec de moindres forces qu’on pourra être compté pour quelque chose et suffisamment respecté dans ce monde nouveau, que nous ne verrons pas, mais qui s’approche assez pour projeter déjà sur nous son ombre et dans lequel vivront nos petits-fils, Puisse la préoccupation de ce redoutable avenir nous faire estimer à leur juste prix nos misérables querelles, et nous unir enfin dans un vœu ardent et dans un généreux effort pour la perpétuité et pour l’honneur du nom français[1] ! »

Aujourd’hui comme à cette époque, il semble que des forces aveugles ont lancé les nations les unes contre les autres : tous les trains sont sur la même voie, le nôtre en tête, poussé en queue par le suivant, ayant devant lui plusieurs autres convois qui marchent dans le sens opposé. Les mêmes rencontres vont se produire, dans les mêmes parages, entre des masses plus fortes, animées de vitesses plus grandes. Et ce sont les mêmes cris impuissants, les mêmes menaces inutiles, les mêmes propos optimistes et naïfs. Préparons-nous.

Prévost-Paradol avait cru trouver, dans les terres vierges et fertiles de l’Algérie, la régénération de

  1. Prévost-Paradol, la France nouvelle, chapitre de l’Avenir, p. 373. Voir aussi Fachoda, par M. Gabriel Hanotaux, Notre Empire africain, p. 179.