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d’ailleurs la presse algérienne n’a nullement présenté le projet de façon blessante pour les Arabes. En fait, il y a eu beaucoup de nègres en Afrique septentrionale, il y en a encore beaucoup au Maroc : il n’y a pas de question nègre, tandis qu’il y a une question israélite, qui est une question sociale plutôt qu’une question de race.

Nous prêtons volontiers nos préjugés aux autres ; mais l’Islam ne connaît pas de races, tout se réduit à la religion. Encore pour le soldat est-il des grâces d’État ; les sultans du Maroc ont eu à leur service des légions chrétiennes, avec leurs temples, leurs aumôniers, leurs évêques. L’Arabe méprise l’esclave, parce que l’esclave est forcément un infidèle, puisque, d’après le Coran, un musulman ne peut être esclave. Il méprisait l’esclave blanc, vendu sur le marché au temps de la piraterie barbaresque ; il méprise moins l’esclave noir, et l’on a vu des Arabes de grande tente déshériter leurs enfants au profit de leurs Abids[1]. Mais on a vu de tout temps des renégats de toute race et des noirs occuper les plus hautes situations dans les empires musulmans. À Fez, en 1910, le chambellan du sultan, qui est en même temps l’adjoint du ministre de la Guerre, est un noir. Un bataillon nègre, dont le sultan a pris soin de ne pas confier l’instruction militaire aux officiers français, et qu’il soigne particulièrement, a dénié à la dernière fête du Mouloud. Les Abids de ce tabor ont un uniforme analogue à celui de nos tirailleurs sénégalais, bleu sombre, ceinture et

  1. Les Ouled Sidi Cheik, par le colonel de Colomb (plus tard général).