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naire, sont traités exactement comme les troupes européennes, et qui ont gardé les brillants uniformes du second Empire. Nos Sénégalais réclameraient les mêmes avantages, fort coûteux, qui auraient l’inconvénient de leur faire perdre leur rusticité. Établissons-les dans des rez-de-chaussée sommaires et construits en brique, avec des lits de camp, et laissons leur en temps normal leur ration de riz, quitte à leur donner du pain ou du biscuit en colonne : il n’y a aucun avantage à les entraîner à cette nourriture, qui exige l’entretien d’hommes du contingent français employés à faire du pain pour nos troupes indigènes. De même les tirailleurs algériens envieraient la libre vie du Sénégalais, qui contraste avec leur existence de caserne, et les négresses.

Bien qu’ils puissent vivre sous tous les climats, ce serait jouer la difficulté que de placer nos Sénégalais sur les Hauts Plateaux, où la température est assez rigoureuse pendant l’hiver. Mais il n’y a aucun inconvénient à les mettre dans l’extrême sud[1], vers l’extrémité des lignes ferrées. Les emplacements de Boni-Ounif et de Colomb-Béchar, dans la province d’Oran, sont très bien choisis ; entre El Kantara et Biskra, on peut trouver des points analogues. Toutefois ce n’est pas dans cette région que nous voyons les fortes réserves de l’armée noire. Elles

  1. D’après Duveyrier et Largeau, la présence des Sénégalais dans la région saharienne serait un retour à un habitat primitif : « Des nègres, dont quelques-uns sont encore sur place », dit Duveyrier, « ont occupé le Sahara avant toute autre race et ils y ont atteint un degré de civilisation qui n’a jamais été dépassé par leurs successeurs ». Actuellement le mélange avec les Arabes ksouriens est tel qu’il est difficile de trouver des nègres de type pur.