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çais ; donc cette mesure ne soulèverait même pas la question de principe qui a été invoquée ― à tort, selon nous — quand on a discuté le service militaire obligatoire des indigènes algériens. Non seulement les noirs de ces communes jouissent de droits politiques égaux à ceux des électeurs français, mais ils ont l’avantage d’un statut personnel qui leur garde leurs lois civiles pour la polygamie, la liberté entière de tester, etc. À condition de constituer des corps spéciaux, traités à peu près sur le même pied que les troupes européennes, il semble bien que la population l’admettrait sans difficulté et nous pourrions constituer deux beaux bataillons d’infanterie sénégalaise qui tiendraient garnison au Sénégal ; comme l’état civil existe dans ces communes, nous aurions la possibilité de retrouver nos réservistes ; ces deux bataillons nous fourniraient en cas de mobilisation une brigade complète. Le projet vaut donc un sérieux examen.

À première vue, la création de corps spécialement favorisés, où seraient seuls admis les soldats du service militaire obligatoire, présente des inconvénients à côté de nos corps indigènes actuels, réservés aux soldats de carrière qui seraient moins bien traités. Ceux-ci réclameraient les avantages de ceux-là et comment les leur refuser ? Tous nos indigènes, qu’ils soient du Sénégal ou du Soudan, se considèrent comme Français, français noirs, mais très français. Comment leur faire comprendre que les indigènes français, quand ils servent volontairement et qu’ils sont employés au dehors, dans des campagnes pénibles et meurtrières, pendant presque toute leur carrière, sont moins bien traités que quand on les