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la brèche aux buffles.

inquiet de G… ni de P… ; mais j’étais moins rassuré sur le compte de M. C… Nous avions justement tué en route deux magnifiques serpents à sonnettes qu’il avait voulu à toute force rapporter. Il les avait pendus au pommeau de sa selle. Leurs longs corps gris d’argent tachetés de brun viennent fouetter la croupe de son cheval, qui bondit comme un cabri à travers les roches. Nous descendons l’un à côté de l’autre, d’une allure insensée, dans le lit du creek : nous passons comme une avalanche à travers les buissons qui le remplissent. En remontant sur l’autre berge, nous nous trouvons tout à coup au milieu de trente ou quarante bœufs qui, en nous apercevant, détalent la queue en l’air. Nos chevaux, de plus en plus persuadés qu’il s’agit d’un roundup sérieux, choisissent chacun leur animal et s’attachent à lui avec une ténacité digne d’une meilleure cause. À ce moment, je regarde le docteur les grelots de ses serpents sonnent toujours ; il est cramponné au pommeau de sa selle ; mais il tient encore ses étriers et se comporte aussi vaillamment que possible, malgré le train.

Rassuré sur le compte de M. Ch…, je cherche à me rendre compte de ce qu’ont pu devenir ses compagnons. P… galope à côté d’un cow-boy ; quant à G…, son cheval semble s’être donné la tâche de ramener une génisse blanche qui filait sournoisement hors de la bagarre. Je les vois de loin, jouant à cache-cache dans le lit du creek, dont ils escaladent les berges douze ou quinze fois. Après une défense héroïque, la génisse blanche se déclare, heureusement, vaincue et revient au grand galop vers le gros du troupeau, ramenant derrière elle le docteur G…

Au bout d’une demi-heure, tous les animaux sont