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la brèche aux buffles.

R…, interrogé sur ses origines et sa filiation, a répondu ainsi qu’il suit :

Il ne sait pas où il est né ; croit que cet événement est survenu dans le Nouveau-Mexique, il y a une cinquantaine d’années ; n’a jamais connu son père et n’a conservé qu’un très vague souvenir de sa mère.

Au physique, le déposant est un petit homme trapu, légèrement voûté, toujours couvert de guenilles, et dont le visage et les mains sont très noirs. Il n’a pas été possible de déterminer dans quelle proportion cette couleur doit être attribuée ou à la nature ou à la qualité à laquelle il est fait allusion au second alinéa de ce mémoire.

Il a commencé par être bull-whacker, c’est-à-dire bouvier. Il conduisait à travers la Prairie les chariots des émigrants ou des marchands qui traitent avec les Indiens ; s’est très souvent battu avec ces derniers ; n’a cependant jamais été scalpé, ce qu’il attribue à sa bonne étoile ; interrogé sur les souvenirs que lui ont laissés ses fréquents rapports avec lesdits Indiens, a répondu : Have always been pestered by them ! admire only dead ones ! « Je ne les aime que quand ils sont morts ! »

Il a fini par s’élever à la dignité de freighter, c’est-à-dire que, ayant économisé de quoi acheter une centaine de bœufs et quelques chariots, il s’est fait entrepreneur de transports dans la Prairie ; avait gagné quelque argent dans cette industrie, quand, au cours d’un de ses voyages, il a eu le bonheur de rencontrer celle qui est maintenant madame R…, dans un bar, à Deadwood. Il lui a offert son cœur d’abord, qui a été accepté sans difficulté, puis, quelques années plus tard, son nom, qui l’a été également. Alors on a vendu