Page:Mandat-Grancey La brèche aux buffles - 1889.djvu/304

Cette page a été validée par deux contributeurs.
284
la brèche aux buffles.

vernement de son pays ne perd pas une occasion de le molester. Le dernier mot qu’il ait dit à tous ces misérables pour lesquels la France républicaine n’a plus de pain a été celui-ci :

« Allez ! mes enfants, puisqu’il le faut ; mais du moins, restez toujours Français et catholiques ! »

Il a dit « Français » avant « catholiques » ! C’était peut-être un lapsus : mais il l’a dit. Je connais d’estimables personnages qui détestent les prêtres parce que, disent-ils, ce sont des hommes qui n’ont pas l’ombre de patriotisme : ces mêmes personnages ont envoyé leur souscription pour le monument d’un officier déserteur, Armand Carrel, qui a fait le coup de feu contre les troupes françaises en Espagne.

Mais voilà que je m’écarte de mon sujet. Ce que je voulais établir, c’est qu’il y a malheureusement en France, à l’heure qu’il est, un grand nombre de gens, un nombre de gens beaucoup plus grand qu’on ne le croit, qui en sont réduits à songer à l’émigration. Presque tous pensent aux États-Unis. Quelles sont leurs chances de réussite ? Voilà la question que je voudrais traiter en quelques mots.

Posons d’abord un principe. Quand un étranger arrive dans un pays, il se trouve ordinairement, à moins de circonstances tout à fait exceptionnelles, dans un état d’infériorité relativement aux gens du pays, parce qu’il ne connaît ni leur langue ni leurs usages et que, à mérite égal, ils aimeront toujours mieux avoir affaire à des compatriotes. Pour compenser cette infériorité, il faut :

Ou bien que l’émigrant ait des aptitudes tout à fait spéciales ; ceux-là se tirent d’affaire partout ; il est inutile de s’occuper d’eux ;