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la brèche aux buffles.

Cela vous fait faire des choses qu’on regrette trop. »

Il porte toujours un superbe revolver monté en argent. Il a dû s’en servir mal à propos. Avant de venir ici, il a travaillé pendant quelques mois sur le ranch du fameux Buffalo-Bill, qui se trouve à une centaine de milles dans le Sud. Il n’a pas l’air d’avoir conservé un bien bon souvenir de ses rapports avec lui. He is a fraud ! dit-il. Nul n’est prophète dans son pays. Avant d’être consacré grand homme par les Anglais, Buffalo-Bill n’était pas un bien grand compagnon dans le sien. De son vrai nom, il s’appelait Bill-Cody et exerçait la profession de chasseur et d’Indian Scout, c’est-à-dire qu’il servait de guide aux troupes dans les guerres contre les Indiens. Quand on construisit le chemin de fer du Pacifique, la compagnie avait fondé dans tous ses ateliers des cantines pour nourrir ses ouvriers. Cody eut la fourniture de la viande qui s’y consommait. Dans ce temps-là, il y avait encore beaucoup de buffles, et les bœufs, au contraire, étaient assez rares et se payaient en conséquence. Cody ne fournit que des buffles, qui ne lui coûtaient qu’un coup de fusil. De là son nom. Quand le chemin de fer fut construit, il ne restait pas beaucoup de buffles dans la Prairie, mais Cody avait mis de côté une assez jolie somme. Il l’employa à acheter un ranch, dans lequel il perdit à peu près tout ce qu’il avait gagné. Il se lança alors dans la politique et acquit bientôt la réputation d’être un admirable agent électoral. C’est à lui que la plupart des hommes d’État du Nébraska doivent leur élection. Opérait-il pour l’amour de l’art ? Personne ne l’a jamais cru. Ce n’est guère d’ailleurs dans les habitudes des agents électoraux, pas plus dans le Nébraska qu’ailleurs.