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xv
préface.

un personnage de l’antiquité : Non omnis moriar !

La succession des deux associés se trouvant vacante, M… et A… se déclarèrent ses héritiers. Ils se trouvaient là sur la lisière de la forêt qui s’étend sur tous les Black-Hills. La vallée, assez étroite d’abord, s’élargit en descendant du côté de la Chayenne. Le pays, très accidenté par les derniers contreforts des montagnes, produisait une herbe abondante et de très bonne qualité, et cependant le sol était si rocailleux, que de longtemps on n’aurait pas à redouter l’arrivée des émigrants. En s’assurant des trois cours d’eau qui coulent aux environs, on pouvait disposer d’un parcours de vingt à vingt-cinq mille hectares.

Avec les sapins que leur fournissait la forêt, ils construisirent eux-mêmes une écurie pour leurs étalons. Dans un coin, ils s’étaient ménagé un petit réduit, et c’est là qu’ils passèrent leur premier hiver. Au printemps suivant, rejoints par un ami, ils allèrent dans l’Orégon et y achetèrent un troupeau de soixante-quinze juments qu’ils ramenèrent à petites journées, — sept ou huit cents kilomètres, — malgré la neige et les Indiens. En route, les juments commencèrent à pouliner. Il fallait marcher quand même, car on ne pouvait pas s’arrêter. Dix ou douze poulains moururent quarante-cinq survécurent. Dans le nombre, il y en eut une quinzaine qui firent plus de deux cents kilomètres dans les dix premiers jours qui suivirent leur naissance. Le général Daumas dit quelque part qu’un poulain arabe peut résister à autant d’heures