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la brèche aux buffles.

assis, le cavalier roulait par terre, et l’éléphant s’éloignait en trottinant d’un air ravi.

Ces souvenirs de jeunesse me sont revenus à l’esprit ce matin, quand j’ai essayé de suivre le convoi des étalons. À chaque instant, précisément au moment où je m’y attendais le moins, j’entendais un juron, et puis je voyais un gros percheron, debout sur ses jambes de derrière, s’avançant vers moi malgré tous les efforts du cow-boy qui le montait, dans l’intention évidente de me lancer un coup avec ses pieds de devant. Dans ces conditions-là, la promenade manque complètement de charme ; aussi, laissant mes compagnons prendre une certaine avance, je me suis mis à vagabonder un peu dans la Prairie. Une bande de sarcelles barbotait dans un creek : je tirai sur elles toutes les cartouches de mon revolver, sans même parvenir à les faire lever. J’avisai ensuite un village de chiens de Prairie. Tous ses habitants, debout à l’entrée de leur terrier, s’annonçaient mutuellement mon arrivée en aboyant avec fureur. Mon premier coup n’eut d’autre résultat que de les faire tous rentrer précipitamment chez eux.

Tous ces exercices cynégétiques m’ont pris un certain temps. Aussi mon estomac ne tarde pas à m’avertir que le moment de déjeuner ne peut pas être très éloigné. En regardant autour de moi, j’aperçois une colline, en forme de pyramide, qu’on m’a indiquée comme servant d’amer pour arriver à la ferme du descendant des rois d’Irlande. Effectivement, je ne tarde pas à apercevoir une assez grande maison de bonne apparence, entourée de quelques écuries et de grandes meules de foin et de maïs. Au pied de l’une d’elles sont piquetés nos chevaux.