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la brèche aux buffles.

la colline se couronna aussitôt de soixante ou quatre-vingts juments et poulains qui descendirent lentement pour le rejoindre. Elles appartenaient sans doute à quelque ranch éloigné, car je ne reconnaissais pas leur marque. Arrivée auprès de l’étalon, toute la troupe se disposa en un grand cercle dont il occupait le centre ; les poulains et les antenais en dedans, auprès de leurs mères, et puis tous se mirent à manger paisiblement. Toutes les cinq ou six minutes, l’étalon s’arrêtait et jetait un coup d’œil autour de lui pour voir si tout allait bien. Une jument s’écarta un peu ; un hennissement bref et sonore lui fit tout de suite relever la tête et regagner sa place en courant. Deux antenais se mirent à jouer ensemble ; mais le jeu dégénéra tout de suite en bataille. L’étalon s’approcha, lança un coup de dents dans le flanc du premier, et un coup de pied au second. Eux aussi rejoignirent leur place sans en demander davantage.

À ce moment, cinq ou six hennissements aigus et prolongés se firent entendre derrière moi. Je retournai la tête. C’étaient les percherons qui arrivaient. Ils avaient suivi un autre chemin que le mien, et je les avais dépassés sans m’en douter. Aussitôt, toute la bande fut en mouvement. Les juments vinrent se grouper ensemble ayant leurs poulains entre leurs jambes. L’étalon se tenait à cent pas devant elles, les naseaux ouverts, grattant le sol du pied. Les percherons s’avançaient toujours, l’un derrière l’autre, maintenus difficilement par les cow-boys. L’étalon fit trois ou quatre bonds en avant, tournant la tête de temps en temps comme pour rassurer les juments, qui, à la vue des hommes, commençaient à se sauver. Raymond était en avant du convoi. Après un moment d’hésitation, le cheval cou-