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la brèche aux buffles.

pas. Aussi les recettes furent-elles superbes. Un certain jour, s’il m’en souvient, le caissier de la compagnie encaissa 8 dollars !

L’appétit vient en mangeant. Les citoyens prééminents de Rapid-City, blasés sur les joies du tramway, aspirent maintenant à faire de leur ville, qui compte bien six ou sept mille âmes, le centre de toute la région sud du Dakota, et, pour arriver à ce résultat, il leur a semblé qu’ils ne pouvaient pas mieux faire que d’y organiser ce qu’on appelle ici un state-fair, c’est-à-dire un comice agricole.

Ce genre de solennité est trop dans le goût des Américains pour que cette idée n’ait pas été accueillie avec enthousiasme : les adhésions sont arrivées de tous les côtés. On nous a fait l’honneur de nous envoyer ici, il y a quelques semaines, une députation spéciale pour demander à Raymond d’envoyer les étalons de Fleur de Lis Ranch. Il n’avait pas voulu s’engager, car, dans cette saison, il est bien difficile de les faire voyager. Mais en constatant le superbe état de ceux qui viennent d’arriver, il a pris le parti d’en envoyer cinq de ces derniers.

Il est parti lui-même ce matin, emmenant un chariot chargé des vivres et des bagages. J’ai vu la caravane défilant sous mes fenêtres. Derrière marchaient les cinq chevaux, tout joyeux de se sentir sur le sol ferme et élastique de la Prairie, qu’ils ont l’air d’apprécier singulièrement après leurs quatre semaines de traversée en bateau ou en chemin de fer, traversée qu’ils ont du reste supportée d’une manière remarquable, car ils sont presque aussi gras qu’au départ, et, à voir l’ardeur avec laquelle ils se jettent sur leur avoine, on se sent très rassuré sur leur sort.